mercredi 1 avril 2015

Frédéric Sali - Colmar 8 juin 1913



Colmar - 8 juin 1913


« A l’occasion du 4e Concours organisé par la Fédération des Sociétés musicales d’Alsace-Lorraine (Bund) la vieille et si jolie ville de Colmar, où naquirent Rapp, Bruat, Henner et Hansi, avait arboré, la dimanche 8 juin 1913, ses pavois des grands jours. Elle s’est drapée dans un élégant manteau de verdure, de couleurs, de drapeaux et de guirlandes, pour recevoir dignement ses hôtes d’un jour : touristes orphéonistes et membres du jury venus des quatre coins de l’Alsace. Le soleil lui-même, qui avait boudé une partie de la semaine, daigna prêter, par dérogation, le concours de ses chauds rayons aux organisateurs de cette fête si belle et si réconfortante.
Mes excellents camarades et compatriotes ont bien voulu me faire le grand honneur de me convier, pour la seconde fois, à siéger parmi eux comme juré et me désigner pour présider, au théâtre, le jury du groupe des Sociétés de la Division d’Excellence où la lutte était particulièrement chaude entre deux Sociétés également brillantes : l’Harmonie Strasbourgeoise, directeur M. Aug. Dieffenbach, et l’Harmonie de Munster, directeur M. Hahnemann.
….
Une réunion préparatoire, en vue de la formation des différents jurys et l’élaboration des directives pour la journée du lendemain, eut lieu à Strasbourg, le samedi soir à 5 heures, dans un local de la Brasserie du Pêcheur.
Le départ pour Colmar s’effectua le dimanche matin à 6 heures.
… .
La réception à Colmar se fit à l’hôtel « A la Ville de Nancy » où, à la place de notre traditionnelle brioche, un succulent plat de rognons sautés, arrosés d’un « Riesling » fameux, nous fut servi.
Je dois avouer, dussé-je passer pour le plus impénitent des gourmands, que ce contact avec l’art culinaire colmarien trouva en moi un amateur qui ne « boudait pas à l’ouvrage ». Je ne comptai pas de mesures et fis un solo en règle.
Les organisateurs avaient tout prévu.
Rien n’avait été négligé et le programme de la journée, lourdement chargé, fut exécuté avec une précision mathématique.
Président du Jury du Théâtre, comme je viens de la dire, j’eus à entendre cinq Sociétés :

Division d’Honneur
Harmonie Strasbourgeoise, 78 exéc., dir. A. Dieffenbach
Harmonie de Munster, 55 exéc., dir. E. Hahnemann
Fanfare Eintracht de Colmar, 48 exéc., dir. C. Fett
1ère Division, 1ère Section
Orphéon-Fanfare de Mulhouse,  70 exéc., dir. E. Bossert
Fanfare de Bischheim, 53 exéc., dir. Ch. Stoll

La salle était pleine à craquer et de nombreux officiers de la garnison s’y trouvaient réunis.
En nous mettant à table, nous avions la certitude que tout était fait : diplômes signés, palmarès établi, récompenses prêtes à êtres remises aux sociétés, etc, …
Le défilé, réglé avec une précision minutieuse, se déroula au milieu d’une foule enthousiaste et au son de nos plus entraînantes marches françaises.
….
Le point terminus du cortège eut lieu au Champ de Mars, en face des monuments Rapp et Bruat, où le morceau d’ensemble L’Alsacien, spécialement composé par moi pour la circonstance, fut exécuté par toutes les Sociétés réunies sous ma direction.
….
Il m’est impossible de dépeindre ici les sentiments qui m’ont agité quand je levai ma baguette pour l’exécution de L’Alsacien, en face de mes illustres compatriotes, le général Rapp et l’amiral Bruat, si virils sur leurs socles de pierre ; ils me semblaient crier dans leurs poses épiques « En avant » !
Sous leurs regards fiers et impérieux, je dis aux milliers de musiciens qui m’entouraient : « A Nous ! » et L’Alsacien fut enlevé à la baïonnette.
Au kiosque du Champ-de-Mars, se firent applaudir, tour à tour, l’Orphéon de Mulhouse ; l’Eintracht, de Colmar ; la Cécilia, de Saverne ; l’Harmonie de Bischheim ; la Fanfare de Sainte-Marie-aux-Mines ; alors que la Vogesia de Strasbourg, venue comme musique d’honneur, l’Harmonie Strasbourgeoise et l’Harmonie de Munster se succédaient sur le kiosque municipal.…
Rentré à Strasbourg à 1 heure du matin, je m’endormis heureux d’avoir vécu quelques heures inoubliables au milieu de bons amis, sur cette terre d’Alsace qui me vit naître et que j’aime tant ».

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire